Les mesures antidumping et compensatoires ont pour objet de rétablir une concurrence loyale entre les produits importés des pays tiers et les produits fabriqués dans l'Union européenne (UE). La finalité n'est pas de punir les importations tierces ou d'augmenter artificiellement le coût des produits importés, mais de lutter contre des pratiques jugées déloyales par l’OMC. Pour cette raison, ces mesures ne s’appliquent qu’à l’encontre des importations des pays d'où émanent les pratiques jugées déloyales.
Comprendre les notions de base
Les entreprises de l’Union européenne (UE) qui s’estiment lésées par des pratiques de dumping ou de subvention émanant de sociétés d'un pays exportateur tiers ont la possibilité de déposer une plainte auprès de la Commission européenne qui peut décider d'ouvrir une enquête antidumping ou anti-subvention. Cette enquête peut conduire à l'institution d'un droit antidumping ou d'un droit compensateur à l'encontre du pays exportateur concerné.
Quel est le but des droits antidumping ?
Un produit fait l'objet d'un dumping, lorsque les sociétés du pays exportateur vendent ce produit à l'exportation à un prix inférieur à sa valeur normale. La valeur normale est normalement basée sur le prix auquel le produit est vendu sur le marché intérieur du pays exportateur.
Le niveau de dumping ou « marge de dumping » correspond donc à la comparaison entre ce qui est considéré comme étant la valeur normale du produit, qui est basée sur le prix pratiqué sur le marché intérieur du pays exportateur, et le prix de ce même produit à l'exportation.
La marge de dumping sert de base à la détermination du taux de droit antidumping qui sera institué par la Commission.
Lorsque la Commission décide d'imposer des droits antidumping, la marge de dumping est en principe calculée pour toutes les sociétés du pays exportateur qui se sont manifestées au cours de l'enquête. C'est pour cette raison qu'il n'existe pas un seul droit antidumping par pays exportateur, mais des droits antidumping dont les taux varient selon le niveau de dumping pratiqué par les sociétés du pays exportateur.
Quel est le but des droits compensateurs ?
Un produit est considéré comme faisant l’objet d’une subvention, lorsque les pouvoirs publics du pays d’exportation accordent, directement ou indirectement, un avantage financier à la fabrication, à la production, à l’exportation ou au transport de tout produit exporté vers l’UE.
Le droit compensateur vise à supprimer les effets produits par une subvention.
Comment sont calculés les droits antidumping et compensateurs ?
Les droits antidumping et compensateurs peuvent revêtir plusieurs formes :
- la forme d’un droit ad valorem exprimé en pourcentage ;
- la forme d’un droit spécifique, c’est-à-dire un droit prélevé sur la base d'un montant fixe par quantité.
Modalités d’application des droits antidumping et compensateurs
Les règlements d’exécution instituant les droits antidumping ou compensateurs peuvent créer selon les cas :
- un droit unique commun à toutes les sociétés exportatrices ;
- des droits dits individuels pour les producteurs-exportateurs qui ont coopéré avec l’autorité en charge de l’enquête. Pour les autres sociétés, qui ne se seront pas manifestées au cours de l’enquête, un droit dit résiduel, supérieur au droit accordé aux sociétés ayant coopéré, sera appliqué ;
- des exonérations pour les sociétés qui s'engagent à exporter le produit, visé par un droit compensateur ou antidumping, à un prix supérieur au seuil fixé par l’autorité chargée de l’enquête.
Principes gouvernant la mise en place d’un droit antidumping ou compensateur
Aperçu du cadre légal
Les règles applicables aux droits antidumping, ainsi qu’aux droits compensateurs, sont définies dans deux règlements de base :
- Règlement (UE) 2016/1036, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne ;
- Règlement (UE) 2016/1037, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet de subventions de la part de pays non membres de l’Union européenne.
Ces textes sont complétés par des règlements d’exécution qui précisent les modalités d’application des droits antidumping et compensateurs nouvellement institués.
Principaux éléments concernant la procédure d’enquête
La procédure débute par le dépôt d’une plainte auprès de la Commission européenne par toute personne ou association agissant au nom de l’industrie de l’Union. Elle peut également, dans certains cas, débuter sur simple initiative de la Commission.
Les producteurs européens soutenant la plainte doivent constituer une part représentative de la production de l’Union ; cette part est fixée à 50 % lors du dépôt de la plainte et ne peut en aucun cas être inférieure à 25 % pendant le déroulement de la procédure.
La plainte doit, également, contenir suffisamment d’éléments pour démontrer l’existence d’un dumping, d’un préjudice, ainsi que d’un lien de causalité entre les importations faisant l’objet d’un dumping et le préjudice allégué.
Lorsque des éléments de preuve, suffisants pour justifier l’ouverture d’une enquête, sont apportés, la Commission doit débuter la procédure d’enquête dans un délai maximum de 45 jours, à compter de la date du dépôt de la plainte.
L’annonce de l’ouverture d’une enquête antidumping ou antisubvention est publiée au Journal officiel de l’Union européenne.
Tout au long de la phase d’enquête qui va durer 15 mois maximum, les différentes parties concernées (producteurs-exportateurs, importateurs, utilisateurs, consommateurs) sont invitées à se faire connaître auprès de la Commission et à présenter leurs arguments.
Les informations fournies peuvent avoir un impact, notamment pour les producteurs-exportateurs, sur le niveau des droits antidumping ou compensateurs. Il est donc dans l’intérêt des sociétés de coopérer aux enquêtes menées par la Commission.
Adoption de droits provisoires au cours de l’enquête
Au cours de l’enquête et si un examen préliminaire permet de conclure à l’existence d’un dumping ou d’une subvention et d’un préjudice pour l’industrie de l’Union, la Commission peut décider d’adopter des droits provisoires, au plus tôt soixante jours et au plus tard neuf mois à compter de l’ouverture de la procédure.
En cas d’adoption d’un droit provisoire, la mise en libre pratique des marchandises est subordonnée à la constitution d’une garantie égale au montant du droit provisoire.
Le but des droits provisoires est de protéger les entreprises européennes au cours de l'enquête. Il s'agit d'une mesure conservatoire.
Mise en place d’une procédure d’enregistrement au cours de l’enquête
La Commission peut, au cours de l’enquête, demander aux autorités douanières de prendre les mesures appropriées pour enregistrer les importations qui pourraient être soumises à droits antidumping ou compensateurs. Cette procédure intervient sur demande dûment motivée de l’industrie de l’Union.
Imposition de droits définitifs à l’issue de l’enquête
À l’issue de son enquête, la Commission peut conclure à l’existence d’un dumping ou d’une subvention.
En cas de mise en place d'une procédure d'enregistrement ou de droits provisoires au cours de l'enquête, il est possible que les droits définitifs s'appliquent de manière rétroactive et conduisent à une perception des droits au titre des déclarations validées pendant la période d'enregistrement ou des déclarations soumises à droits provisoires.
Connaître la durée et les procédures de réexamen des droits en vigueur
Les droits antidumping et compensateurs sont institués pour une période limitée : 5 ans pour les droits antidumping et 4 ans pour les droits compensateurs.
À l'expiration de ces mesures, les producteurs intéressés peuvent demander à la Commission de procéder à un réexamen en vue de leur maintien.
Les droits en vigueur peuvent également faire l'objet d'un réexamen intermédiaire lorsque leur maintien ne se justifie plus ou lorsqu'un nouveau producteur, n'ayant pas pu participer à l'enquête initiale, se fait connaître.
Le réexamen intermédiaire
- Il est procédé à un réexamen intermédiaire à la demande d'un exportateur, d'un importateur ou des producteurs de l’UE, si une période d'un an au moins s'est écoulée depuis l'instauration des mesures définitives. La demande doit démontrer que le maintien des mesures n’est plus nécessaire, ou que la mesure existante n'est plus suffisante.
- Un réexamen est également effectué pour les nouveaux producteurs-exportateurs du pays d'exportation qui n'ont pas exporté le produit au cours de la période d'enquête ayant conduit à l'institution de la mesure.
Le réexamen au titre de l'expiration des mesures
Six mois avant l'expiration des mesures, la Commission publie un avis d'expiration prochaine. Les producteurs communautaires sont alors invités à présenter le plus rapidement possible leur demande de réexamen. La demande doit démontrer que la suppression des mesures favoriserait la continuation ou la réapparition du dumping ou du préjudice. Un tel réexamen peut, également, être ouvert sur initiative de la Commission.
Les enquêtes anti-contournement menées par la Commission
Un contournement se définit comme une modification de la configuration des échanges entre les pays tiers et l’UE qui n’est motivée que par le fait d’éluder une mesure de défense commerciale.
Cette opération consiste, pour un producteur originaire d’un pays visé par une procédure antidumping, à exporter ses produits vers l’UE par l’intermédiaire d’un pays tiers non soumis à droit antidumping.
Une enquête est ouverte à la demande d’un producteur de l’UE, lorsqu’il existe suffisamment d’éléments de preuve indiquant que le contournement existe.
Si l’enquête conclut à l’existence d’un contournement, les mesures antidumping vont être étendues aux importations en provenance du pays concerné.
Les procédures de remboursement ouvertes aux opérateurs
Il existe deux cas distincts qui peuvent ouvrir droit à remboursement.
La procédure de remboursement ouverte suite à modification de la réglementation applicable aux droits antidumping et compensateurs
À l’instar des droits de douane, les droits antidumping ou compensateurs peuvent faire l’objet d’un remboursement dans les cas prévus par les articles 116 à 121 du Code des douanes de l’Union (CDU).
À titre d’exemple, un remboursement des droits antidumping peut découler de l’annulation ou de la modification d’un règlement instituant des droits antidumping ou compensateurs.
Les demandes de remboursement liées à une élimination de la marge de dumping ou du montant de la subvention
Le règlement (UE) 2016/1036, article 11-8, sur les droits antidumping et le règlement 2016/1037, article 21, sur les droits compensateurs prévoient la possibilité, pour un importateur, d’obtenir le remboursement des droits acquittés, lorsqu’il est prouvé que la marge de dumping ou que le montant de la subvention a été éliminée ou réduite à un niveau inférieur au niveau du droit en vigueur.
Cette procédure est distincte de la procédure de remboursement prévue aux articles 116 à 121 du CDU.
La demande de remboursement est transmise à la Commission européenne, via l’État membre sur le territoire duquel les produits ont été mis en libre pratique. Cette demande doit intervenir dans les 6 mois à compter de la date à laquelle le montant des droits définitifs ont été perçus ou à la date à laquelle les montants, déposés au titre des droits provisoires, ont été définitivement perçus.
La demande de remboursement doit contenir des informations précises sur le montant du remboursement réclamé et être accompagnée de tous les documents douaniers relatifs au calcul et au paiement de ce montant. Elle doit aussi comporter des preuves, pour une période représentative, des valeurs normales et des prix à l’exportation vers l’UE pour l’exportateur ou le producteur auquel le droit est applicable.
La décision sur le remboursement des droits intervient, normalement, dans les douze mois et pas plus de dix-huit mois après la date à laquelle une demande de remboursement a été introduite par un importateur du produit soumis à droits antidumping ou compensateurs.
Bon à savoir…
Comment déposer une plainte en cas de concurrence déloyale suite à un dumping ou à une subvention ?
Tout dépôt de plainte ou de demande de réexamen doit être envoyée à la Commission européenne à l’adresse suivante :
Commission Européenne
Direction générale du commerce
Direction B
Bureau J-79 5/16
B-1049 Bruxelles
Où déposer une demande de remboursement ?
Les demandes de remboursement fondées sur les articles 11-8 du règlement antidumping (UE) 2016/1036 et article 21 du règlement anti-subventions (UE) 2016/1037 doivent être adressées, pour transmission à l’UE, à la Direction générale des douanes et droits indirects à l’adresse suivante :
Direction générale des douanes et droits indirects
Sous-direction du commerce internationale
Bureau COMINT3 – Politique tarifaire et commerciale
11 rue des deux Communes
93558 Montreuil cedex
France
Courriel : dg-comint3@douane.finances.gouv.fr
Où puis-je trouver les mesures antidumping et anti-subventions en vigueur ?
L’encyclopédie tarifaire RITA est mise à jour chaque fois qu’une nouvelle mesure antidumping ou anti-subvention est instituée. Les mesures en vigueur peuvent être consultée en entrant la nomenclature du produit ciblé dans l’onglet réglementation, puis en ouvrant l’onglet « antidumping et mesures de rétorsion ».
Comment suis-je informé de l’ouverture d’une enquête ou de l’application d’une nouvelle mesure ?
Tout texte réglementaire de l’Union instituant une mesure de défense commerciale est publié au Journal officiel de l’UE. La douane relaie les dernières publications par le biais d’un avis aux importateurs mis en ligne dans l'espace open data.