Dans certaines situations déterminées des redevances , ou « royalties », versées, directement ou non, par l'acheteur doivent être intégrées dans la valeur en douane des marchandises importées.
Cette fiche technique a pour vocation d’apporter les éléments nécessaires permettant de déterminer :
- pourquoi des redevances versées font partie de la valeur en douane des marchandises ;
- quand et à quelles conditions ces redevances doivent être ajoutées ;
- dans quelle proportion elles doivent l’être ;
- et comment l'opérateur doit s’y prendre.
Sommaire
- Introduction
- Définition
- Conditions de fond d'inclusion des redevances
- Détermination de la part des droits de licence à inclure dans la valeur en douane
- Les modalités déclaratives à adopter si le montant des redevances n’est pas connu au moment de l’importation
Bases réglementaires :
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Articles 70§1, 71§1-c) et 74 du Code des Douanes de l’Union
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Article 136 du Règlement d’Exécution 2015/2477 de la Commission
Jurisprudence :
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Arrêt CJUE du 9 juillet 2020, Curtis Balkan, aff. C-76/19. Redevances constituant une « condition de la vente » des marchandises à évaluer, versées par l’acheteur à sa société mère en contrepartie de la fourniture du savoir-faire nécessaire à la fabrication de produits finis. Marchandises acquises auprès de tiers et constituant des composantes à incorporer dans les produits sous licence.
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Arrêt CJUE du 9 mars 2017, GE Healthcar, aff. C-173/15. Paiement de redevances ou de droits de licence à des tiers pour l’usage de droits se rapportant à des marques de commerce ou de fabrique.
Instruments UE/OMD :
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Commentaire 3 du Comité du Code – Section valeur en douane (UE)
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Avis consultatif 4-1 à 4-15 du Comité Technique de l’Évaluation en Douane – OMD
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Commentaire 25-1 du Comité Technique de l’Évaluation en Douane - OMD
1. Introduction
Éléments de composition de la « valeur économique réelle des marchandises », les redevances et droits de licence relatifs aux marchandises à évaluer, que l'acheteur est tenu d'acquitter, soit directement soit indirectement, en tant que condition de la vente des marchandises à évaluer, sont à ajouter au prix payé ou à payer pour les marchandises importées dans la mesure où ces redevances et droits de licence n’ont pas été inclus dans le prix effectivement payé ou à payer par l’acheteur.
En règle générale, les redevances et droits de licence sont payés en contrepartie de l’exercice de droits dont l’octroi est juridiquement matérialisé par des contrats de licence.
Un contrat de licence est un contrat par lequel le titulaire d’un droit protégé, incorporé généralement dans une marchandise, concède ce droit à une autre personne en contrepartie du paiement d’une rémunération (redevances ou droits de licence). Les droits protégés reconnus par la législation servent à protéger la création intellectuelle aussi bien dans le domaine industriel et commercial que dans le domaine culturel.
L’examen destiné à déterminer si, et dans quelle mesure, des redevances et droits de licence doivent être pris en compte en tant qu’élément à ajouter dans la valeur en douane des marchandises importées se déroule en trois étapes :
- Vérification de la satisfaction des conditions de fond cumulatives fixées à l’article 71§1-c du CDU
- les redevances ne doivent pas être déjà comprises dans le prix payé ou à payer ;
- les redevances sont en lien avec les marchandises importées ;
- le paiement des redevances conditionne la vente des marchandises importées.
- Détermination de la part des redevances et droits de licence à prendre en compte
- Imputation de la part des redevances et droits de licence sur la marchandise importée
Chaque situation individuelle doit être analysée au regard des circonstances particulières de l’espèce, des dispositions légales et des stipulations contractuelles ainsi que de toute autre information pertinente.
L’article 136 du REC n’est pas synonyme d’intégration systématique des redevances dans la valeur. Cette disposition vise, au contraire, à renforcer les conditions d’intégration, en précisant notamment ce qui doit être considéré comme une condition de la vente.
2. Définition
Le CDU ne donne aucune définition de la notion de « redevances et droits de licence ».
Pour autant, l’article 12§2, du modèle de convention fiscale de l’OCDE concernant le revenu et la fortune constitue à cet égard une aide à l’interprétation1.
Définition des redevances (article 12§2 du modèle de convention de l’OCDE) :
« […] rémunérations de toute nature payées pour l’usage ou la concession de l’usage d’un droit d’auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce, d’un dessin ou d’un modèle, d’un plan, d’une formule ou d’un procédé secrets et pour des informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique ».
Le facteur déterminant pour le classement d’un paiement dans la catégorie des redevances n’est donc pas le fait que le paiement soit désigné sous le terme de « redevances », mais l’objet du paiement. Ce dernier doit servir à rémunérer des droits pour pouvoir être qualifié de redevance.
Parmi ces droits, on trouve notamment mais pas exclusivement :
- les brevets ;
- les dessins, modèles et plans ;
- les droits d’auteur ;
- les marques de fabrique ou de commerce ;
- le « savoir-faire » en matière de production, qui fait figure d’exception du fait de l’absence de statut juridique particulier, et les autres droits attachés à des procédés de fabrication incorporés aux marchandises importées.
L’article 71§1-c du CDU relatif à la prise en compte des redevances et droits de licence ne s’applique que lorsque les coûts à examiner correspondent effectivement à des redevances et droits de licence au sens de la réglementation douanière.
Dans certains cas, des paiements peuvent être qualifiés de redevances ou de droits de licence sans l’être au sens de la réglementation douanière.
Lien - redevances & « apports » immatériels - Si la redevance est versée par l’acheteur à un donneur de licence au titre de l’utilisation d’un savoir-faire de fabrication (protégé ou non)2 et si ce savoir-faire est mis gratuitement à la disposition d’un producteur de marchandises importées afin de produire les marchandises, les dispositions qui s’appliquent ne sont pas celles de l’article 71§1 - c du CDU (« redevances »), mais celles de l’article 71§1- b iv) du CDU (« Apports - immatériels » ).
Les redevances acquittées indirectement par l'acheteur - Il peut arriver, notamment lorsque l'acheteur est membre d'une firme multinationale et qu'il a des fonctions spécifiques (exemple - centrale d'achat, etc.), qu'il ne lui revienne pas de reverser les redevances au donneur de licence. Dès lors, dans la mesure où la société qui paie effectivement les redevances est liée à l'acheteur au sens de l'article 127 du REC, il doit être considéré que c'est un paiement indirect de l'acheteur.
3. Conditions de fond d'inclusion des redevances
3.1. Les redevances ne doivent pas déjà être intégrées au prix payé ou à payer par l’acheteur
La plupart du temps, les redevances ne font pas déjà partie du prix. C’est notamment le cas lorsque les redevances sont calculées après l’importation ou qu’elles sont versées à une personne autre que le donneur de licence.
Néanmoins, dans certaines situations, les redevances peuvent déjà faire partie du prix. Dès lors, elles ne doivent plus y être ajoutées au titre de l’article 71.
3.2. Les redevances doivent être en lien avec les marchandises importées
Les redevances et droits de licence doivent se rapporter aux « marchandises à évaluer » (article 71§1-c du CDU). Par conséquent, un lien doit exister entre la redevance versée et la marchandise importée.
3.2.1. Les redevances rémunérant des prestations postérieures à l’importation
Pour déterminer si un lien existe, il est nécessaire de se concentrer sur l’état de la marchandise à la date de son importation.
Les redevances rémunérant un processus effectivement réalisé dans le pays d’importation doivent, en principe, être ignorées3.
Exemple :
des redevances versées en contrepartie du droit reproduire des marchandises importées sur le TDU se rapportent à un processus qui n’intervient qu’après l’importation. Une prise en compte de redevances de cette nature dans le prix effectivement payé ou à payer au titre de la marchandise importée est donc à exclure.
3.2.2. L’impact des modalités de calcul des redevances sur le lien avec les marchandises importées
Si la redevance est calculée sur la base du prix des marchandises importées (taux ou forfait), il est présumé que le paiement de cette redevance se rapporte à la marchandise à évaluer.
Mise à part cette présomption, le mode de calcul de la redevance importe peu pour établir le lien avec la marchandise à évaluer.
Dans la majorité des cas, la redevance est calculée sur la base de taux qui s’appliquent au prix de revente des marchandises importées ou au chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise importatrice. Le montant des redevances est susceptible de varier en fonction des résultats de l’entreprise et sa comptabilité n'est pas impactée au moment de l’importation.
Le fait que le montant des redevances à verser est déterminé à la suite de la revente des marchandises importées sur le territoire d’importation, sur le chiffre d’affaires réalisé par l’acheteur, etc. est sans préjudice sur l’éventuel lien existant entre les redevances et les marchandises importées.
Le calcul du montant de la redevance ou du droit de licence sur la base des prix de revente n’est pas pertinent pour établir le lien avec la marchandise à évaluer. Le facteur déterminant, c’est la contrepartie en vertu de laquelle la redevance ou le droit de licence est versé.
Il faut pouvoir déterminer que la contrepartie du paiement des redevances est, soit les marchandises elles-mêmes, soit une partie intégrante des marchandises importées ou alors que les marchandises importées sont nécessaires à la production des produits couverts par la licence.
Pour que la redevance ou le droit de licence soit pris en compte, il faut que les droits transférés en contrepartie soient incorporés dans les marchandises importées4 ou que les prestations du donneur de licence5 aient déjà été utilisées lors de la fabrication des marchandises importées, voire que les marchandises soient inutilisables ou invendables sans la contrepartie de la redevance.
Exemple :
les marchandises importées incorporent la marque pour laquelle la redevance est versée ou les marchandises importées sont les ingrédients ou les composants essentiels du produit sous licence.
Dès lors, il existe un lien avec les marchandises importées.
La redevance6 doit donc être prise en compte, totalement ou partiellement, pour le calcul de la valeur en douane des marchandises importées, sous réserve que les trois autres conditions soient remplies.
S’il est déterminé que les redevances et droits de licence ne sont que partiellement liées aux marchandises importées, il doit être procédé à un ajustement approprié (voir Partie VI).
Un contrat de licence (de distribution, de redevances, etc.) et ses annexes font habituellement apparaître :
- la nature et le but essentiel de l’accord ;
- la mention des brevets, marques et autres droits concernés ;
- le mode de calcul de la redevance.
C’est la raison pour laquelle, il peut être particulièrement utile d’analyser les dispositions contractuelles pour établir ce lien.
3.3. Le paiement des redevances en tant que condition de la vente
La troisième condition à la prise en compte des redevances et droits de licence dans la valeur en douane est que l’acheteur doit être tenu de les verser pour pouvoir acheter les marchandises à importer et à évaluer.
Les redevances peuvent être directement ou indirectement versées par l’acheteur au vendeur.
En vertu des dispositions de l’article 136§4 du REC, une redevance ou un droit de licence est considéré comme conditionnant la vente lorsque :
- a – Article136§4 - Le vendeur ou une personne liée au vendeur requiert de l’acheteur qu’il effectue ce paiement.
Les marchandises sont acquises auprès du donneur de licence (titulaire des droits)
Si le vendeur des marchandises et le titulaire des droits auquel l’acheteur verse des redevances et droits de licence en contrepartie de ces droits sont la même personne, il convient de présumer que le paiement des redevances est, en plus du paiement du prix d’achat, une condition de la livraison des marchandises sous licence.
Cf : Raisonnement présenté par l’avocat général Paolo Mengozzi au point 67 des conclusions de présentées le 28 juillet 2016 à l’occasion de l’Affaire C-173/15.
Les marchandises sont acquises auprès d’une société tierce, liée7 au donneur de licence
Si l’acheteur n’acquiert pas les marchandises sous licence auprès du donneur de licence, mais auprès d’une société liée à ce dernier (article 127 du REC), la condition de la vente est présumée toujours satisfaite dans la mesure où le donneur de licence exerce un contrôle, direct ou indirect, sur le vendeur, lui permettant de s’assurer que les marchandises sont fournies à l’acheteur, parce que celui-ci s’acquitte des redevances ou des droits de licence.
Cf : points 68/69 et 71 de l’arrêt du 9 mars 2017, Affaire C-173/15 et points 66 à 68 des conclusions de l’avocat général Paolo Mengozzi présentées le 28 juillet 2016.
La notion de lien entre les parties ne saurait s’étendre aux relations commerciales et aux associations d’affaires telles que mentionnées à l’article 127§2 du REC.
S’il est établi que les marchandises sont acquises auprès d’une société tierce, non liée au donneur de licence, il faut se référer aux articles 136§4 - b puis 136§4 - c du REC.
- b – Article 136§4 - Le paiement est effectué par l’acheteur pour satisfaire à une obligation du vendeur.
Tel est le cas lorsque le vendeur de la marchandise importée est lui-même le preneur de licence, mais fait payer par son acheteur les redevances et droits de licence dont il est en fait redevable.
- c – Article136§4 - Les marchandises ne peuvent pas être vendues à l’acheteur ou achetées par celui-ci sans versement des redevances ou des droits de licence à un donneur de licence.
Dans cette hypothèse, l’article 136 du REC ne fait plus référence à la notion de lien entre les parties.
Dès lors, pour pouvoir déterminer si les marchandises ne peuvent être vendues ou achetées sans versement des redevances ou des droits de licence, il est important de pouvoir déterminer s’il existe une influence/interaction entre le/les contrat d’achat/fournisseur et le contrat de licence.
L’étude approfondie de l’article 136§4 est notamment pertinente dans la mesure où les redevances sont versées à un tiers et non au vendeur des marchandises.
Dans ses Orientations du 28 avril 2016 relatives à l’article 136 du REC8, la Commission européenne renvoie au Commentaire 25.1 du CTED de l’OMD qui traite des cas dans lesquels des redevances et droits de licence versés à un tiers sont pertinents pour la valeur en douane.
Pour déterminer si l’acheteur peut acheter les marchandises importées sans verser une redevance ou un droit de licence, il convient de vérifier toutes les circonstances de la vente et de l’importation des marchandises et notamment les liens entre les contrats de vente et de licence. Les facteurs suivants peuvent ainsi être pris en compte :
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la redevance ou le droit de licence sont mentionnés dans le contrat de vente ;
-
le contrat de licence fait référence à la vente des marchandises importées ;
-
en vertu des dispositions du contrat de vente ou du contrat de licence, le contrat de vente peut être résilié pour manquement au contrat de licence si l’acheteur ne verse pas la redevance au donneur de licence. Cela indique qu’il existe un lien entre le paiement des redevances ou des droits de licence et la vente des marchandises à évaluer ;
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le contrat de licence prévoit une clause selon laquelle l’absence de versement des redevances ou droits de licence entraîne pour le fabricant l’interdiction de fabriquer et de vendre les marchandises dans lesquelles est incorporée la propriété intellectuelle du donneur de licence, et de les vendre à l’importateur ;
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l’accord de redevance ou de licence contient des clauses autorisant le concédant à gérer la production ou la vente entre le fabricant et l’importateur qui vont au-delà d’un simple contrôle de la qualité.
L’examen visant à déterminer si le paiement d’une redevance ou d’un droit de licence est une condition de la vente ne doit pas uniquement être effectué du point de vue du vendeur. Il convient également de prendre en considération les obligations de l’acheteur.
Si ces obligations sont susceptibles de restreindre la capacité de l’acheteur à acheter, la redevance devra être considérée comme pertinente pour la détermination de la valeur en douane, dès lors qu’elle est également en lien avec la marchandise à évaluer. Dans la pratique, un examen minutieux des contrats (de licence et d’achat) et des circonstances de la vente est indispensable.
Il convient de présumer qu’il existe un lien entre le contrat de licence et le contrat d’achat dans les exemples ci-dessous :
-
les fabricants des marchandises importées sont désignés de manière contraignante par le donneur de licence dans le contrat de licence ou dans un autre document. L’acheteur ne pourrait pas acquérir la marchandise sous licence sans conclure le contrat de licence ;
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d’après les instructions du donneur de licence, le fabricant ne peut vendre la marchandise importée qu’aux preneurs de licence désignés par le donneur de licence. Dans ce cas, le vendeur ne peut pas vendre la marchandise à l’acheteur sans que ce dernier verse des redevances ou droits de licence ;
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en vertu du contrat de licence, le preneur de licence est tenu de conclure avec le fabricant un contrat de production (dont un modèle est souvent joint au contrat de licence) par lequel le fabricant s’engage à ne livrer les produits sous licence qu’au preneur de licence. Parallèlement, un tel contrat oblige souvent le fabricant à fournir sur demande au donneur de licence (par exemple à la fin des relations contractuelles) toutes les formes, dessins et modèles et autres marchandises utilisés pour la reproduction des produits sous licence ou à les détruire, et à respecter certaines exigences du donneur de licence (code de conduite ou instructions relatives à la fabrication, l’emballage, la livraison et la distribution des produits sous licence par exemple) ;
-
le donneur de licence oblige le preneur de licence à imposer aux fabricants de ne produire et de ne fournir les produits sous licence qu’à son intention ;
-
le preneur de licence doit veiller à ce que ses fabricants respectent les obligations prévues par le contrat de licence.
En présence des éléments énumérés ci-dessus, il importe d’établir la capacité d’influence juridique dont dispose effectivement le donneur de licence en vertu des contrats.
L’intervention d’un tiers, « commissionnaire », lié au donneur de licence, dans le processus d’achat des marchandises importées pour veiller à ce que le vendeur des marchandises sous licence vende ces dernières exclusivement aux preneurs de licence, qui, à leur tour, paient des droits de licence pour ces marchandises, peut être un élément susceptible de restreindre la capacité de l’acheteur à acheter, ou du vendeur à vendre sans versement des redevances.
4. Détermination de la part des droits de licence à inclure dans la valeur en douane
4.1. Intégration du montant total de la redevance
On considère qu’une redevance se rapporte intégralement aux marchandises importées notamment dans les cas suivants :
-
seuls les produits importés intègrent les droits pour lesquels les redevances sont dues ;
-
les opérations effectuées après importation sont des opérations mineures (du type reconditionnement, dilution, apposition d'une marque, ou encore assemblage ne nécessitant aucune technologie particulière) ;
-
le contrat de redevance porte exclusivement sur la concession de l'usage d'une marque de fabrique ou de commerce et les marchandises sont revendues en l’état, ou après des opérations mineures ;
-
la redevance est calculée sur le prix d'achat ou sur la quantité de marchandises sous licence importées.
4.2. Incorporation d'une partie de la redevance
Il est nécessaire d’effectuer une répartition dans les cas suivants :
-
seulement une partie des redevances est en relation avec les marchandises importées ;
-
la redevance couvre des éléments incorporables (procédé breveté incorporé dans les marchandises importées, ou encore savoir-faire technique permettant la mise en œuvre de composants importés pour la fabrication sur le territoire douanier de l'Union d'un produit fini soumis à redevances) et non incorporables (savoir-faire commercial) ;
-
lorsqu’un contrat de licence porte à la fois sur un procédé breveté incorporé dans les marchandises importées et sur la concession d'un droit de marque. La part des redevances versées au titre de la marque n'est pas retenue si les marchandises brevetées importées font l'objet d'une transformation ou d'une ouvraison après importation.
À titre d’exemple, les redevances dues pour bénéficier d’un savoir-faire sur la distribution, de l’utilisation rémunérée du nom d’enseigne, des dépenses de marketing réalisées, de l’utilisation d’un procédé de fabrication sur le territoire d’importation, etc., ne sont pas pertinentes pour la détermination de la valeur en douane des marchandises importées.
Conformément aux dispositions de l’article 136§3 du REC, si les redevances ou les droits de licence se rapportent en partie aux marchandises à évaluer et en partie à d’autres marchandises (produites localement ou achetées dans le territoire d’importation), ou éléments ajoutés aux marchandises après leur importation, voire à des activités ou services postérieurs à l’importation, il est nécessaire de procéder à un ajustement approprié.
Si, dans cette situation, il peut être établi que le produit acquiert une partie de sa valeur après importation (transformation, ouvraison du produit), la redevance applicable au produit fini doit être répartie proportionnellement entre les éléments importés achetés auprès du donneur de licence (ou d'une société liée ou encore d'une société tierce dès lors que la condition de la vente est remplie) et les autres éléments mis en œuvre.
Exemple :
Des droits de licence sont versés par la société importatrice en contrepartie du droit de fabriquer et de vendre des produits brevetés. La société importatrice achète auprès du donneur de licence des pièces nécessaires au processus de création des marchandises brevetées.
Après étude du dossier, il est avéré que les redevances versées sont liées tant aux pièces détachées importées qu’au processus de fabrication qui les met en œuvre. Les redevances sont égales à 10% du prix de vente net.
Le schéma de répartition suivant peut notamment être utilisé :
prix des produits importés (150€) + prix des autres produits incorporés dans la fabrication (100€) + frais de fabrication (60€) +....
= prix de revient industriel (PRI) = 310 €
PRI (310€) + frais de vente (20€) + marge (63 €)+…
= prix de vente net soumis à redevance = 383 €
Redevances à intégrer dans la valeur en douane = redevances x (prix des produits importés / PRI)
= 38,3 x (150/310) = 18,5 €
48,39 % du montant des redevances versées sont liées aux marchandises importées
Si la contrepartie concédée en vertu d’un contrat de licence est composée d’éléments virtuellement taxables et non taxables mais qu’il est déterminé que l’acheteur n’exploite pas les éléments non taxables de manière effective, il peut être considéré que l’intégralité de la redevance est à inclure dans la valeur en douane.
Les ajustements effectués doivent, dans la mesure du possible, se référer à des données objectives et quantifiables.
À défaut, il conviendra d’évaluer la proportion de redevances à intégrer dans la valeur en douane en vertu de l’une des méthodes secondaires définies aux articles 74§2 et 3 du CDU. Dans un tel cas de figure, il est fréquent que le montant des droits de licence pertinents pour la valeur en douane soit évalué conformément aux dispositions de l’article 74§3 du CDU permettant l’utilisation de la méthode dite du « dernier recours ».
C’est la raison pour laquelle, l’attention de l'importateur qui préfère s'en tenir à la méthode de la valeur transactionnelle est appelée sur la nécessité de fournir des données objectives, vérifiables et quantifiables9 permettant une juste répartition des droits de licence et, ainsi, l’application de la méthode prévue à l’article 70 du CDU.
Le cas échéant, des informations émanant du donneur de licence ou de toute autre partie peuvent également être utiles pour déterminer la valeur en douane de marchandises importées, ajustée du montant de redevances inconnu au moment de l’importation.
5. Les modalités déclaratives à adopter si le montant des redevances n’est pas connu au moment de l’importation
Comme cela a été mentionné supra, les droits de licence sont régulièrement versés après l’importation des marchandises et calculés sur la base du chiffre d’affaires net réalisé par l’acheteur. Par conséquent, le montant des droits de licence n’est pas toujours connu au moment de l’évaluation des marchandises importées.
Dès lors, plusieurs solutions sont proposées à l’opérateur pour pouvoir utiliser la méthode de la valeur transactionnelle (article 70 du CDU) :
- la sollicitation d’une autorisation de valeur provisoire (Recommandé) ;
- la sollicitation d’une autorisation d’ajustement de la valeur en douane (Recommandé) ;
- la sollicitation ponctuelle d’une soumission cautionnée (Procédure D48) en cas de régularisation dans les 4 mois suivant l’importation.
À défaut, l’évaluation en douane sera obligatoirement réalisée selon une méthode secondaire avec une prise en considération du prix facturé auquel sera appliqué une majoration estimée en vertu de l’article 74§3 du CDU. Cette majoration ne pourra être ni minimale, ni arbitraire, ni fictive.
Notes :
1 Voir aussi le point 3.2 des Orientations de la Commission européenne sur l’article 136 du règlement d’exécution du CDU du 28 avril 2016, TAXUD B4/ (2016) 808781, rév. 2.
2 Cela est également valable pour d’autres prestations intellectuelles nécessaires à la production des marchandises importées (dessins et modèles par exemple).
3 Pour autant, une situation créée artificiellement pour faire naître un droit donnant lieu au versement de redevances après l’importation des marchandises, ne sauraient justifier automatiquement de l’absence de lien entre la redevance versée et la marchandise importée (exemple : activation d’un logiciel après l’importation, etc.).
4 Exemple : un brevet, droit d’auteur, une marque.
5 Exemple : savoir-faire ou dessins et modèles.
6 Ou la part s’y rapportant.
7 Les liens entre les parties sont définis à l’article 127 du REC.
8 TAXUD B4/ (2016) 808781 (révision 2).
9 Contrat de licence, contrat de savoir-faire, contrat de vente, correspondance entre le donneur et le preneur de licence, notes de négociation préalables à l’établissement du contrat de licence, etc.